Les disques de l’année 2025, # 4 : Candice Ivory

© : Profil Facebook de Candice Ivory.

Pour la cinquième année consécutive, je vous propose ma liste des 10 disques qui ont selon moi marqué cette année 2025. Comme toujours, je vous rappelle qu’il ne s’agit pas d’un classement, mais seulement d’une liste de mes dix disques préférés. En revanche, début 2026, je publierai cette fois un véritable Top 10 de ces albums de l’année 2025. Comme l’année dernière, outre les disques, je vous proposerai aussi une liste de mes cinq livres favoris. Le quatrième album est « New Southern Vintage » par Candice Ivory, sorti chez Nola Blue. Deux ans après le superbe « When the Levee Breaks – The Music of Memphis Minnie » chez Little Village (numéro 1 de mon Top 10 des disques de l’année 2023), Candice confirme avec ce nouvel album qu’elle fait bel et bien partie des meilleures chanteuses de blues en activité. Voici maintenant ma chronique de ce disque.

Avec Jimmy « Duck » Holmes et Ben Levin. © : Profil Facebook de Candice Ivory.

L’album compte treize chansons et une courte narration de 36 secondes sur les traditions par Andrew Cohen. C’est d’ailleurs une force de ce disque plein de caractère : proposer une musique actuelle aux sonorités modernes mais en faisant ressortir toute la richesse des traditions dont elle se nourrit. On trouve sept compositions originales écrites ou coécrites par Candice et son guitariste Robert Allan Parker, membre des Blue Bloods avec Adam Hill (guitare), Khari Wynn (basse) et Donnon R. Johnson (batterie). Elle s’entoure également de plusieurs invités sur lesquels je m’arrête plus loin, qui contribuent à la variété et à l’originalité de l’ensemble. Cela commence fort avec Ain’t So Blind, un shuffle nerveux qui dépoussière Baby Please Dont’ Go avec un Jan Hartmann qui ne fait pas de quartier à l’harmonica. Les mêmes enchaînent avec Blue Blood, pur jus sudiste épicé avec sa rythmique minimaliste.

En haut : David Evans, Damion « Yella P » Pearson, Andrew Cohen, Ben Levin. En bas : Candice Ivory et Jimmy « Duck » Holmes. © : Profil Facebook Instagram de Candice Ivory.

Sur I’m in Trouble, une reprise de Joe Henry Hicks des Fieldstones (dont fit partie Willie Roy Sanders, le grand-oncle de Candice), Ben Levin apparaît au piano, et associé à l’harmonica, à la slide et les vocaux qui se font plus impérieux, le morceau prend beaucoup d’épaisseur. Mais la formation ne semble pas vouloir emprunter une seule ligne directrice, ce dont témoignent trois chansons écrites par Robert Allan Parker. Foolish Pleasure, sur lequel Candice partage son chant tout en sensualité avec le Kenyan Yubu Kazungu, est plus apaisé avec des sonorités quasi orientales et l’orgue de Chris Stephenson. Plus loin, Let Your Love Shine On se veut également un peu mystique dans un registre aux effluves soul blues, avec cette fois l’Équatorien Antonio Vergara à la guitare et aux chœurs. Enfin, Look Away est une vraie ballade soul rehaussée par l’orgue très présent de Stephenson, et qui montre une Candice impliquée au chant. Trois chansons en marge du blues, mais bien travaillées et arrangées. Et nous savons combien Candice peut s’aventurer sur bien des terrains.

© : Roberto Cuesta.

Sur Lookin’ for My Baby, si le piano et la guitare restent efficaces, Candice impressionne quand elle s’exprime ainsi avec ampleur et urgence. Strong Black Mattie, qui est bien sûr un clin d’œil à la tradition du Hill Country Blues, ne manque pas de caractère avec sa wah-wah et son orgue. Vient alors Catfish Blues, un sommet sur lequel Candice se contente de souligner la voix hantée de Jimmy « Duck » Holmes, pendant que guitare, piano et harmonica (Damion « Yella P » Pearson au top !) tissent une trame lancinante et imparable. Les quatre dernières plages, toutes remarquables, sont plus ancrées dans la tradition. Sur Corrina, David Evans tient la guitare avec Ben Levin toujours au piano, et Candice nous sert un autre beau numéro vocal. La composition Crown Royal Bag Blues, tout en retenue (Pearson et Takuto Asano aux guitares), n’est pas sans rappeler le blues urbain des années 1940 ! L’album s’achève sur deux chansons de Memphis Minnie pas si souvent reprises, World of Trouble et Shout the Boogie revu en boogie-woogie dévastateur. On ne peut qu’encourager Candice Ivory dans cette voie, et j’ajoute quatre extraits, I’m in Trouble, Lookin’ for My Baby, Catfish Blues et Crown Royal Bag Blues.

Au Caveau de la Huchette à Paris, 2 juin 2025. © : J-M Rock’n’Blues/Soul Bag.