
Auteur de dix-huit faces toutes enregistrées lors d’une même session en 1949, le chanteur-guitariste Dan Pickett fait partie de ces bluesmen dont nous savons bien peu de choses. Ainsi, son lieu de naissance précis est inconnu, tout comme sa vie avant ses enregistrements, il fut longtemps difficile de formellement établir son identité, et sur les deux photos censées le montrer, une seule est authentifiée (qui figure en ouverture de cet article malgré sa piètre qualité). On la doit au chercheur et photographe allemand Axel Küstner, qui rencontra en 1993 des membres de la famille de Pickett, et qui parvint ainsi à en savoir un peu plus à son sujet. Enfin, d’aucuns affirment que Dan Pickett et Charlie Pickett (qui enregistra en 1937) sont un seul et même artiste, ce qui est toutefois très improbable… Et quoi qu’il en soit, l’œuvre de Pickett, traditionnelle alors que le blues électrique se répand partout, est absolument remarquable. Chanteur expressif et véhément, il se distinguait surtout par son jeu de guitare, en slide ou style classique, avec un phrasé personnel tantôt fluide ou percutant en rythmique, ce qui le situe entre Country Blues du Delta et de la Côte Est.

Il naît James Founty le 31 août 1907 dans le comté de Pike, Alabama, au sud de Montgomery. Sans doute bluesman itinérant, il se trouve à Philadelphie, Pennsylvanie, le 23 août 1949, quand il grave pour le label local Gotham dix chansons qui paraissent sur cinq singles sous le nom de Charlie Pickett (nul ne sait quand et pourquoi il se fit appeler ainsi). Lors de la même séance, il enregistre huit autres morceaux (dont deux versions de Drivin’ that thing), qui ne verront pas le jour avant la fin des années 1980 sur des compilations. Certaines discographies lui en prêtent deux supplémentaires, I’m going back with Jesus et I can buy it (The stuff is here), mais à ce jour, elles n’ont pas été retrouvées. Dans les années 1960, au moment du Blues Revival, des collectionneurs s’intéressent à Pickett et recherchent ses 78-tours, qui font à leurs yeux partie des meilleurs disques de Country Blues réalisés après la Seconde Guerre mondiale !

Cette quête permettra d’en savoir un peu plus sur ce bluesman bien mystérieux. Une lettre rédigée par James Founty (le vrai nom de Pickett) est retrouvée, datée de juillet 1950 et adressée à un avocat, Charles R. Paul, dans laquelle le bluesman se plaint de ne pas avoir reçu de royalties. Mais, comme c’est alors courant, son contrat stipule qu’il doit juste être payé pour la séance, sans versement ultérieur de royalties, et qu’il ne peut en outre enregistrer les mêmes chansons pour d’autres labels durant trois ans (source : last.fm). Dès lors, sans doute déçu par le milieu, Pickett ne retournera plus en studio. On ne sait pas ce qu’il devint après ses enregistrements, mais compte tenu de ses aptitudes et de son talent, on suppose qu’il continua ensuite de se produire, même s’il a également « manqué » le train du Blues Revival. Dan Pickett nous a quittés le 16 août 1967 à l’âge de cinquante-neuf ans. Je vous propose tout simplement ci-dessous l’intégralité de sa discographie, soit ses dix-huit chansons du 23 août 1949.

– Laughing rag.
– That’s grieving me.
– Baby how long.
– You got to do better.
– Ride to a funeral in a V8.
– Early one morning.
– Something’s gone wrong.
– Chicago blues.
– Number writer.
– Lemon man.
– Laughing blues.
– Number writer (take 1).
– Decoration Day.
– Drivin’ that thing.
– Drivin’ that thing (alt take).
– 99 1/2 won’t do.
– Baby don’t you want to go.
– I can shake it.
