Portfolio : Black Bottom & Paradise Valley, Detroit, Michigan

Aaron « Little Sonny » Willis, Joe Von Battle, John Lee Hooker et Emmet Slay, en 1959 au Joe’s Record Shop sur Hastings Street. © : Jacques Demêtre / Archives Soul Bag.

Je vous propose un nouveau portfolio, cette fois consacré à la ville de Détroit dans le Michigan. À partir des années 1920, qui correspondent à un développement très marqué de l’industrie automobile, et jusqu’à la fin des années 1950, le quartier afro-américain dit « Black Bottom » sera également un important centre d’activité pour les musiques afro-américaines comme le jazz, le blues et même le gospel. Si l’expression black bottom peut se traduire par « cul noir » en argot, le site, à l’emplacement de l’actuel centre-ville au bord de la rivière Détroit, était déjà identifié par les premiers colons comme une bottom land, une plaine alluviale fertile… Dans la partie est de la ville, Black Bottom a vu beaucoup d’Afro-Américains affluer pour travailler dans le secteur automobile, qui ont rapidement investi un autre quartier, Paradise Valley. Black Bottom et Paradise Valley se touchent au point que d’aucuns considèrent qu’ils forment un seul et même quartier. On admet toutefois que Gratiot Street les séparent, et, d’une manière générale, que Paradise Valley, où de nombreux clubs de jazz prestigieux virent le jour, était plus huppé, ou plutôt moins pauvre, que Black Bottom, où le blues était plus représenté, notamment autour de Hastings Street, une rue aujourd’hui historique.

Paradise Valley en 1942. © : William Vandivert, The LIFE Picture Collection / Getty Images.

Les amateurs européens de blues ont découvert Hastings Street grâce à deux Français, Jacques Demêtre et Marcel Chauvard, auteur du précieux Voyage au pays du blues, publié en 1994 aux éditions CLARB-Soul Bag et réédité en 2022 par Le Mot et le Reste. Les photographies de Demêtre, qui montrent entre autres John Lee Hooker et le producteur Joe Von Battle (pour lequel Aretha Franklin inaugurera sa discographie), sont des témoignages uniques de cette période. Malheureusement, au tournant des années 1950 et 1960, Black Bottom et Paradise Valley seront quasiment rasés dans le cadre d’un réaménagement urbain et pour permettre le passage d’une autoroute en pleine ville… À la ségrégation s’ajoutent un secteur automobile désormais en crise et un chômage en forte augmentation. Les tensions se multiplient et du 23 au 28 juillet 1967, des émeutes raciales éclatent, d’abord sur 12th Street dans Black Bottom avant de s’étendre à d’autres quartiers. Avec un bilan de 43 morts (33 Noirs et 10 Blancs), ce sont les émeutes les plus meurtrières des États-Unis après les Draft Riots de 1863 durant la guerre de Sécession… À une exception près, les vingt-cinq images de ce portfolio sont toutefois axées sur la musique et antérieures à ces tragiques événements.

Quelque part dans un club de Black Bottom. © : Marsha Music.

Joe Von Battle (à gauche) en 1959 devant son magasin, Joe’s Record Shop, avec son fils Joe Jr. et le coiffeur qui a son salon juste à côté. © : Jacques Demêtre / Archives Soul Bag.

Le développement de Black Bottom va de pair avec celui de l’industrie automobile dans les années 1920. © : Detroit Griot.

Plaque didactique de Paradise Valley. © : Visit Detroit.

The Flame Show Bar a fonctionné de 1949 to 1963. © : Burton Historical Collection / Detroit Public Library / Historic Detroit.

La partie est de Détroit avec les rues Brush, Beaubien, St. Antoine et Hastings, 12 september 1933. La rue diagonale en haut est Gratiot, frontière « virtuelle » entre Paradise Valley et Black Bottom. © : Detroit News Archive.

Macomb Street, Black Bottom, à l’est de Hastings, 12 avril 1930. © : Detroit News Archive.

Washboard Willie, one-man band de Détroit. © : Marsha Music.

Marsha Lynn Battle (qui deviendra Marsha Music), fille de Joe Von Battle, devant le magasin de son père, avec son frère Darryl à l’arrière-plan, vers 1960. © : Marsha Music.

Fondé en 1919 au 3711 Woodward Avenue dans Black Bottom, l’Orchestra Hall prit le nom de Paradise Theatre de 1941 à 1951. © : Detroit Symphony Orchestra / Historic Detroit.

Aaron « Little Sonny » Willis et John Lee Hooker en 1959 sur Hastings Street. © : Jacques Demêtre / Archives Soul Bag.

12th Street (Black Bottom), aujourd’hui Rosa Parks Boulevard, pendant l’émeute raciale de 1967. © : Wayne State University Press.

Plaque didactique de Black Bottom. © : Visit Detroit.

Joe Von Battle au téléphone dans son magasin sur Hastings Street. © : Marsha Music.

Hastings Street. © : Environmental History in Detroit / University of Michigan.

B.B. King s’est produit plus de 30 fois au Flame Show Bar, au 4264 John R Street dans Paradise Valley. Annonce tirée de l’édition du 30 novembre 1956 du Detroit Free Press. © : Historic Detroit.

Démolition de Paradise Valley pour laisser la place à l’autoroute I-375 (Chrysler Freeway), qui ouvrira en 1964. © : Wayne State University / Motor City Muckraker.

John Lee Hooker en 1959 sur Hastings Street. © : Jacques Demêtre / Archives Soul Bag.

Macomb Street, Black Bottom à l’est de Hastings, 3 mai 1950. © : Burton Historical Collection / Detroit Free Press.

Scène du club Three Sixes, sur East Adams Avenue entre Hastings et St. Antoine. © : Burton Historical Collection / Detroit Public Library / Red Bull Music Academy.

 Joe Von Battle dans son magasin sur Hastings Street. © : Marsha Music.

Maison au 1535 Monroe Street dans Black Bottom neighborhood, été 1949. Elle sera détruite à la fin des années 1950 en vue de la construction de l’autoroute I-375. Burton Historical Collection / Detroit Free Press.

Le quartier de Hastings Street avant et après le chantier de l’autoroute I-375. © : Detroit Historical Society.