Sallie Martin, Mother of Gospel Music, nouveau livre par Kay Norton

© : University of Illinois Press.

Face à une actualité riche et variée, j’ai eu peu d’occasions d’évoquer les sorties de livres ces derniers temps, alors qu’elles ne manquent pas ! Je me rattraperai demain avec un récapitulatif des ouvrages qui nous concernent, parus depuis le début de cette année mais aussi à venir. En attendant, je m’arrête sur un livre qui promet beaucoup, à paraître aux presses de l’université de l’Illinois le 6 janvier 2026 : Sallie Martin, Mother of Gospel Music (208 pages, 14,95 dollars). À la fin des années 1920, la scène gospel existe mais elle ne compte aucun chef de fil populaire. Thomas A. Dorsey pourrait l’incarner, mais il est surtout connu pour son activité de pianiste sous le nom de Georgia Tom… dans le blues ! Quant aux représentantes féminines, elles sont rarissimes… Toutefois, la chanteuse Sallie Martin, née le 20 novembre 1895 près d’Atlanta en Géorgie, a déjà de l’expérience quand elle s’installe à Chicago en 1927, avant de rencontrer Dorsey deux ans plus tard.

Sallie Martin vers 1935. © : Michael Ochs / Getty Images.

C’est le début d’une collaboration fructueuse qui va durer une bonne dizaine d’années à différents niveaux. Dorsey, qui sort d’une période de dépression, est l’auteur de nombreuses compositions de gospel mais il a du mal à les diffuser. Bien qu’elle ne sache pas lire la musique, il consent à engager Sallie Martin qui s’en sort bien mieux que lui et permet ainsi à ses chansons d’être mieux distribuées et vont bientôt faire de lui le « Father of Gospel Music »… et plus tard de Martin la « Mother of Gospel Music » ! Grâce à Martin, les compositions de Dorsey sont interprétées par les chorales et les chœurs des principales églises de Chicago (alors la deuxième plus grande ville des États-Unis derrière New York) et même au-delà. En 1932, Dorsey fonde la National Convention of Gospel Choirs and Choruses (NCGCC), et organise l’année suivante avec Martin et d’autres figures du gospel (Theodore Frye, Magnolia Lewis Butts, et Henry J. Carruthers) la première convention de l’organisation, qui existe toujours.

Sallie Martin et Kenneth Morris. © : Cambridge University Press.

En 1940, suite à un différend, Martin quitte Dorsey et crée avec Kenneth Morris sa propre maison d’édition, la Martin & Morris Publishing Company, appelée à devenir la plus importante du secteur aux États-Unis. La même année, elle forme le premier groupe de gospel féminin professionnel, les Sallie Martin Singers, avec notamment deux adolescentes, sa fille adoptive Cora Martin-Moore et une chanteuse-pianiste débutante de seize ans, Ruth Lee Jones, qui mènera ensuite la carrière que l’on sait sous le nom de Dinah Washington (mes articles sur ce site du 29 août 2024 et dans le numéro 256 de Soul Bag). Lasse des tournées, Martin quitte sa formation au début des années 1950 et s’implique dans la lutte pour les droits civiques aux côtés de Martin Luther King, qu’elle accompagne en novembre 1960 à Lagos dans le cadre des célébrations de l’indépendance du Nigéria. Sallie Martin restera active dans le domaine du gospel jusque dans les années 1980 et nous quittera le 18 juin 1988 à quatre-vingt-douze ans.

Sallie Martin, Thomas A. Dorsey et Willie May Ford Smith dans le film Say Amen, Somebody (1982). © : Musée Magazine.